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Les interactions à distance

13 Mai

Plus j’avance dans ce métier, plus je suis convaincu que la réussite de tout projet, l’entrée dans un métier passe par la phase de formation des individus et des groupes, à fortiori dans les métiers liés à l’éducation et à la formation. Il faut prendre le temps de former, cela paraît être un poncif , or c’est une règle d’or. Dit autrement ce ne sont pas des procédures que l’on pense huilées et infaillibles qui priment (même si  les processus de routinisation me semblent indispensables) mais bien notre capacité à penser et elle seule

Le numérique, même s’il offre une palette de solutions  pédagogiques toujours plus grandes, est loin d’être installé dans notre paysage. Le numérique est métaphoriquement le lien entre un ancien et un nouveau monde. Je voudrais ici parler de la distance dans le rapport de formation.

Le numérique bouleverse plus qu’on ne le pense nos modes de pensée et nos modes d’action. J’ai eu l’occasion de traiter ce sujet dans un autre billet car il s’agit de comprendre comment habiter sa professionnalité. Le numérique, en augmentant les espaces en général, et l’espace  de formation en particulier, nous engage à imaginer d’autres modes d’interaction et à les formaliser.
La réponse à la distance est encore trop souvent instrumentale, elle se traduit par des affirmations à l’emporte-pièce comme « Nous vous envoyons le lien pour la visio-conférence« , « nous vous fournissons le matériel« , « vous avez les services en ligne« , … C’est certes un  élément de réponse nécessaire mais il me semble que l’essentiel n’est pas là. Ce sont les nouveaux modes d’interactions qui sont centraux. Il faut partir du postulat qu’à l’heure actuelle notre espace d’interaction et de socialisation est pluriel. Les interactions s’exercent dans le réel et dans le numérique (jamais de façon alternative toujours de façon cumulative). Cela semble assez « simple » dans notre vie privée au moment où nous mixons les deux pour organiser notre quotidien (Air B’NB, Uber, twitter, facebook, skype, instagram, meetic, TGV pro, Auchan direct, impôt en ligne, applis diverses sur les smartphones, …) Nous sommes même entrés dans un monde paradoxal car nous parlons, sans que cela nous paraissent surprenant, à nos machines grâce notamment à Siri. Le dialogue avec  les machines semble s’installer sans provoquer de remous. Votre ordinateur, votre smartphone sont capables de vous répondre, de refuser de vous répondre ou d’exprimer leur incompréhension.

 

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Dans ce cadre d’émergence de nouveaux rapports entre l’Homme et la machine, nous piétinons quand il s’agit de travailler à distance entre Hommes. Il est probable que compte tenu de la rapidité des innovations nous avons omis de puiser dans nos fondamentaux, à savoir la formation à … Pour toutes ces raisons et bien d’autres encore, j’ai commencé à m’interroger sur ces questions de formation sur les interactions à distance. Ce sont des réflexions en forme de brouillons mais elles me permettent d’avancer dans mes analyses. J’ai fait le choix de mêler la réflexion théorique, (je reviendrai en temps utiles sur la question plus conceptuelle du panapotisme dans les relations humaines à distance), et les propositions plus multimodales, peut être plus simples mais dont la fonction est de mettre à plat les questions qui se posent dans notre quotidien professionnel.

En mettant entre les Hommes des machines pour interagir, nous réintroduisons le besoin de comprendre la technologie et le rapport que nous entretenons avec elle. Nous sommes résolument « l’homo technologicus » et nous ne pouvons entrer dans cette classification qu’en inscrivant ce rapport dans un cadre réflexif car la machine n’est pas neutre au regard de notre vie. Elle transforme radicalement notre sociabilité. La machine dans son rapport à l’humain (ou l’inverse) pose de nombreuses questions :

  • Comment qualifier le mélange des espaces ? Quand je télétravaille ma maison se transforme juridiquement pendant 7 heures 45 parce que le lien de subordination imprègne un espace dévolue initialement à la vie privée ;
  • Comment dois je m’exprimer selon les rôle que j’endosse numériquement ?
  • Comment dois je reconfigurer mes interactions en ligne ? Partant du principe que les règles de la vie s’y appliquent (politesse, courtoisie, écoute, attention, …)
  • Bien que classifié dans la rubrique des « travailleurs du savoir » je ne peux me dispenser de comprendre les enjeux techniques de mes environnements numériques.
  • Puis je avoir de l’empathie pour une machine ? Alors que je sais pertinemment que je suis capable d’antipathie pour des humains et d’empathie aussi bien heureusement.

 

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Organiser une visio-conférence, les interactions instrumentées

Le télétravail une modification du travail par transformation du lien de subordination

L’espace de formation en e.learning

25 Fév

Notes graphiques. Ce billet est une forme de brouillon en continu me permettant de mettre en place de futurs billets structurés.

L’espace de formation est une question à la fois très ancienne puisqu’il a fallu depuis longtemps imaginer les lieux de formation. C’est pourtant une question renouvelée avec le numérique. On peut traiter cette question par une pirouette, par une phrase toute faite du type « les espaces sont poreux ». C’est vrai, mais l’affirmation ne règle rien pour autant. Nous sommes à un instant des usages où les lieux de formation (c’est symptomatique nous employons le pluriel, moins le singulier) se transforment. Il nous incombe de proposer une réflexion prospective sur les espaces de formation.

Le débat sur l’espace réel et l’espace numérique est quelque peu stabilisé, nous semblons nous accorder sur l’existence d’un continuum  entre les deux mais … Il nous reste à analyser la question de leur fréquentation en simultanée et en alterné. Comment faut il occuper l’un vers l’autre pendant une session de formation ? Nous sommes ici dans la sphère de la porosité entre le professionnel et l’intime et dans le choix de l’institutionnel et du privé. En acceptant d’ouvrir les flux, on prend le risque de la navigation buissonnière, on prend le risque de limiter la fréquentation des lieux réels institutionnels.

Pour l’instant le risque  est minime car les réflexes de défense  de  l’ancien systèmes sont forts et très ancrés. Pour autant il n’est pas interdit de se mettre en posture de réflexion même si imaginer le futur c’est mobiliser l’état de ce qui existe aujourd’hui.

Comment doit-on, comment peut-on réguler ces ponts spatiaux ?

Je n’aurais pas la prétention de proposer des solutions, je n’en ai pas, mais je vais poser des questions pour engager la réflexion :

  • Comment va évoluer la salle de formation dans un univers numérisé ? ;
  • Quelles sont les propositions immobilières et mobilières qui peuvent être présentées pour activer l’école 2.0 ? Allons au-delà de l’accumulation de machines dans un lieu ;
  • Quels statuts à venir pour les structures immobilières de formation ? Entre volonté de diffuser les ressources en ligne et volonté de fixer les étudiants sur site ? L’injonction paradoxale de la politique immobilière et de la poltique de formation ;
  • Quelle place des lieux non institutionnels ? Doivent-ils être reconnus comme une extension réelle des lieux institutionnels ? ;
  • Quel est l’avenir de l’amphithéâtre si l’on persiste à dispenser des cours massifs en mode frontal ?  Les MOOC ne sont-ils pas une démonstration que l’amphi peut être supprimé, disons atténué ? Là encore nous sommes dans le paradoxe du « je veux » et « je ne veux pas »;
  • Quelle pensée spatiale pour ne pas avoir uniquement un modèle européo / techno centré ? ;
  • Développer des stratégies d’aménagements des locaux  dans les Universités est ce déjà une stratégie de fuite en avant ? Les étudiants ne préfèrent-ils pas déjà travailler de chez eux ? Pourquoi aller sur site quand le même site met tout en oeuvre pour diffuser à distance ? (Cours, bibliothèque, gestion administrative, …) ;
  • La diffusion des espaces de formation en ligne ne préfigure t-elle pas la définition d’un espace unique de formation ?

J’ai bien conscience que mes questions peuvent être vues et lues comme  dérangeantes, certains pourront les interpréter comme ineptes. Je reste persuadé qu’il est nécessaire de  poser ces questions comme base d’un débat sur l’espace de formation à venir.

Vous pouvez contribuer ….

Espace de formation et collaboration, si on essayait vraiment ?

13 Nov

1 – Introduction

Avec un peu de retard, en raison de circonstances indépendantes de ma volonté, je vais tenter de livrer mon analyse post Boussoles 3 du numérique. J’ai choisi cette fois non seulement de tenter une analyse théorique mais aussi, et peut être surtout, de faire une proposition d’action.

Au cours de ces deux jours (14 et 15 octobre 2015)  la question des espaces de formation a été abordée, la table ronde s’intitulait « Espace et temps scolaire » et s’inscrivait dans le cadre de la présentation du PNF (plan national de formation). Michelle Laurissergue donnait la teneur des enjeux dans un éditorial daté du 14 septembre 2015 :

« Des choix, des liens sociaux, des temps et des espaces réinventés

L’école n’est plus un sanctuaire fermé au monde extérieur et l’inclusion dans la société de l’information devient un défi d’autant que de nombreuses questions restent en suspens, questions politiques, économiques, techniques, culturelles et sociales notamment culture dominante, marché prépondérant, communautés virtuelles, transformation des approches du temps, des espaces et du travail, nouveaux modes de formation.« 

À Cenon, les débats, les présentations des initiatives, m’ont conforté dans l’idée que les hypothèses que j’avance depuis des années au sein de ce blog (Tags espace, corps, geste) sont devenues des sujets d’actualité. L’essentiel n’est cependant pas là. Les thématiques développées aux boussoles présentaient de nombreuses convergences, elles s’orientaient vers le même nord pédagogique. Je pense ici précisément au concept de travail collaboratif et à celui de la structure des espaces de formation. La mise en dialogue de ces deux notions m’a engagé à mobiliser des principes théoriques que j’avais déposés de façon éparses dans ma « Think list« . Je peux ainsi avancer de nouvelles hypothèses et des propositions qui structureront cet article. Il sera question dans cet article d’innovation (de disruption) et de management du changement, centrés sur la question des espaces de formation.

2  – Se former

Se former et apprendre en permanence sont deux axes forts dans le contexte actuel car nous sommes résolument ancrés dans la société de l’immatériel. Les temporalités des changements s’accélèrent, il faut être en capacité de s’y adapter. On peut imaginer qu’un élève de primaire est inscrit dans un processus programmé et continué qui va de la formation initiale à la formation continue. L’apprentissage conditionne la construction du citoyen, son éducation et son insertion future. Une fois inséré la formation est un facteur d’adaptation et de maintien des processus productifs.

Personne n’est en capacité de prévoir ce que seront les modalités instrumentées des apprentissages et de la formation dans 10 ans et leurs impacts sur la structure des espaces de formation. Cela nous contraint de poser des jalons conceptuels et des principes d’action pour aborder ce futur aux contours flous.

Dans une société au périmètre incertain il est plus que jamais nécessaire de former aux  disciplines qui aident à conceptualiser. Je pense ici, notamment, à la philosophie, à la littérature, à l’histoire. Nous avons besoin de futurs cadres qui soient capables d’anticiper, de comprendre et d’instrumenter les transformations. Il faut leur donner les moyens de se saisir du matériel conceptuel qui les aideront à absorber les changements et de les transformer en action ou le verbe faire est fécond.

Insister sur la capacité à penser, à conceptualiser ne signifie pas mettre sous l’éteignoir le geste et le corps, j’ai commencé à évoquer cette thématique dans divers articles. Nous commettons aujourd’hui, me semble t-il, une erreur grave (dont nous ne mesurons probablement pas les conséquences) à vouloir cloisonner ce qui relève de la pensée de ce qui relève du geste. Est-il possible de dissocier le geste et la pensée, la pensée et le geste ? Je ne le crois pas.

Cette longue digression introductive me permet de mieux asseoir mon propos sur les espaces de formation. Se donner les moyens de les imaginer est un exercice complexe de pensée systémique (1).

3 – Modifier nos approches

Je vais commencer mon argumentation en listant des questions ? Certaines se posent déjà, d’autres vont se poser avec acuité dans un futur plus ou moins proche :

  • Quel est le temps de translation entre le domicile et le lieu de travail ? Ce temps stérile et improductif ne cesse d’augmenter, peut-on continuer à s’en accommoder ? Quel est le statut de ces espaces transitionnels ?
  • L’immobilier éducatif institutionnel intègre de plus en plus le numérique. Quel peut être le modèle type du lieu d’apprentissage ou de formation ? ;
  • Peut-on encore ignorer l’espace privé des apprenants et des enseignants dans les processus de formation ? Il est devenu une dimension significative mais ignorée de l’apprentissage et de l’enseignement ;
  • Comment peut-on imaginer un nouveau management quand se développe une diversité d’espaces de formation (réel, virtuel, réel institutionnel, réel privé, virtuel institutionnel, virtuel privé). Ils font voler en éclat le principe panoptique ? Voir, ne pas voir pourrait résumer la problématique. Ce management hétéro-spatialisé devra s’orienter vers une capacité à aider, à accompagner les transformations, à être bienveillant plus qu’à se retrancher derrière des textes (forcément en retard d’une bataille) ;
  • Peut-on continuer à entasser des étudiants dans des amphithéâtres pour simplement écouter dans des conditions non optimales ? – « Pour les autres, majoritaires, direction l’amphithéâtre Léon-Binet et ses 900 places, à quelques étages de là, où ils pourront suivre le même cours, retransmis sur grand écran.« 
  • Peut-on imaginer une Université sans référence systématique aux amphithéâtres ? Quelles seraient les solutions spatiales alternatives ?

4 – Collaborer

La question est sensible et peut se résumer par :  » Comment doit-on imaginer les espaces de formation ?  » Revenons donc aux thématiques des Boussoles 3 et formalisons les principes :  » Quel est le champ des possibles qu’offre le mode collaboratif ? « . Je voudrais m’appuyer ici sur l’expérience de Local motor que j’avais découvert à la biennale du design de Saint Étienne en 2013. Ce site est destiné à faire collaborer (à distance notamment) des acteurs engagés dans la conception d’automobiles, l’objectif étant de créer des véhicules. Permettons nous de transférer le principe dans le champ de nos préoccupations.

La conception des espaces de formation est un sujet d’actualité. Je crains cependant que nous passions du rien au tout, c’est-à-dire décréter qu’il faut de nouveaux espaces, montrer quelques constructions de prestiges à titre d’exemple, publier des rapports, le tout dans une démarche louable mais toujours… pyramidale et jacobine. Or si je comprends bien les propos actuels, il faut s’orienter vers des structures et méthodes plus horizontales, plus agiles dont le pilier est la capacité à collaborer et collaborer.

Si le mode collaboratif est la direction qu’il faut suivre alors je me permets de faire une proposition pour la réflexion / production d’espaces de formation.

5 – Penser ET produire

Si nous souhaitons faire bouger les lignes actuelles nous pouvons alors  tenter de créer  un lieu, un espace de travail collaboratif à la façon de local-motor.com

J’imagine donc un espace de travail qui agrègerait les acteurs concernés par la réflexion et la conception des espaces de formation à l’ère du numérique.

Ce lieu devrait obligatoirement intégrer les deux dimensions que j’ai évoquées en introduction la pensée (conceptualiser) et le geste (faire).

Il conviendrait donc de réunir au sein de cet espace des philosophes, des pédagogues, des designers, des décideurs de l’éducation nationale, des décideurs des collectivités locales, des architectes, des enseignants, des étudiants et enseignants des écoles de design (Boulle, Duperré, Estienne, Olivier de Serres,  La Martinière-Diderot, ENSCI, école de design de Saint Étienne …) , les corps d’inspection, des constructeurs, des spécialistes des matériaux (exemple materio) … L’éducation nationale et l’enseignement supérieur rassemblent en leur sein une extraordinaire palette de savoirs et de compétences. Je crois que la volonté de travailler ensemble (y compris avec des acteurs extérieurs comme les constructeurs) en mode collaboratif serait à la fois féconde et très innovante.

La confrontation des points de vue me parait essentielle dans cette démarche collaborative car chacun s’enrichit de l’expérience et des savoirs des autres. Nous avons plutôt tendance à travailler au sein de nos structures et à méconnaître partiellement ce que font les autres.

Le principe collaboratif, tel que je l’imagine, est assis sur le principe d’acteurs qui interviennent avant tout comme force de proposition, plus qu’en référence à un statut ou à un grade identifié. Le collaboratif  ne peut se concevoir de mon point de vue que dans une vision réticulaire où la compétence est la donnée qui prime (il y a cependant souvent un lien entre titre et compétence).

La première difficulté de l’exercice est de transcender la représentation de l’autre pour se concentrer et comprendre ce qu’il est capable d’apporter à la construction du projet.  C’est de mon point de vue la condition sine qua non du réalisable.  Je pense même que la première étape est que les acteurs se présentent et expliquent qu’elle sera leur contribution active. Exemple : que le designer explique  quel est son rôle,  le  sens de son activité, le philosophe expliquant le sens de ses analyses, le représentant des collectivités locales les exigences de sa politique, le programmiste la logique de ses calculs que d’aucun pourraient juger arides, répondant à une logique comptable …. Dépasser les stéréotypes est l’étape N°1, collaborer est au prix de l’émergence d’une communauté d’intérêts. L’entrée dans l’espace collaboratif ne pourrait (pourra) se baser sur l’envie d’y être mais bien sur la capacité à apporter une contribution à l’acte de production.

Ce lieu de réflexion / proposition / construction devrait se fonder sur un principe d’obligation de résultat négocié collectivement. Exemple produire les principes de l’espace de formation instrumenté, concevoir   la pièce de télétravail dans un domicile, Concevoir des plans pour définir une salle de classe intégrant le numérique …

Il ne s’agit pas ici d’un laboratoire permettant de proposer un idéal, un acmé de l’immobilier pédagogique mais bien de produire du concret argumenté, réalisable et transférable in situ. J’entends souvent les enseignants dire  » On ne voit jamais le résultat de notre travail « , Matthew B. Crawford l’exprime, souvent de façon dérangeante mais salutaire, dans son ouvrage intitulé « L’éloge du carburateur« , La découverte, 2010, 249 p, on peut aussi retrouver ces principes chez Richard Sennett in  » Ce que sait la main, la culture de l’artisanat « , Albin Michel, 2010.

La collaboration n’exclue pas une part de compétition. On peut imaginer des équipes pluridisciplinaires travaillant sur le même projet sur un principe de « coopétition« .

6 – Du discours à l’usage

Je me suis contenté, à ce stade, de dresser un cadre formel d’action mais il me semble qu’il répond en partie aux discours et propositions que j’ai pu entendre aux boussoles 3. L’esprit et la démarche collaborative sont des pratiques extrêmement disruptives car elles mettent à mal tout ce qui nous a construit. Nous avons une fenêtre de tir qui s’ouvre, nous avons les moyens de mettre en accord les principes et les actes. Pourquoi ne pas essayer, c’est me semble t-il la seule façon de savoir si nous pouvons réussir (nous prenons aussi le risque d’échouer).

7 – Conclusion

J’aimerais que cette réflexion ne soit pas, comme souvent, une simple trace fixée dans les colonnes de ce blog. pour une fois j’aimerais que les acteurs que j’ai cités prennent la parole et réagissent. J’accepte par principe toutes les analyses, y compris contradictoires dans la mesure où elles sont argumentées. Y aura t-il des personnes qui auront envie de se saisir du principe et pourquoi le mettre en musique ?

Je reste persuadé que le mode collaboratif mérite un travail d’analyse de fond mais il doit obligatoirement avoir son pendant : la production. Saurons nous le faire ? Parlons du collaboratif mais surtout pratiquons le.

(1) – Le projet archiclasse contribue à alimenter cette réflexion.

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Audit du domicile et e.learning. Gestes et habitudes

19 Sep

Billet en rapport

Le travail à domicile, le télétravail, le droit à déconnexion sont des sujets qui commencent enfin à émerger comme éléments de propositions politiques. C’est une façon de reconnaître que l’espace de formation n’est plus la réunion de l’espace réel ET de l’espace virtuel mais bien un élément unique et indivisible.

Cette question de l’accès aux ressources du savoir passe obligatoirement par le domicile des enseignants et des apprenants. Cela pose un ensemble de questions qui agitent la société et qui vont s’accroître me semble t-il avec le temps. La tenue de la COP21 est un élément du débat me semble t-il dans la mesure où les trajets pendulaires dans les grandes agglomérations sont polluants et facteurs de pertes de temps et d’énergie.

Quelle évolution du salariat ? Quelles définitions des statuts dans la fonction publique ? Quelle définition du temps de travail ? Quelle définition du contour de l’espace de travail ? Quelle place donner aux déplacements dans la journée d’un enseignant et d’un apprenant ?

Le e-learning est au centre de ces réflexions car sa mise en place, son développement déporte la notion de lieu de formation. Je reste persuadé que la question est sous estimée quand elle n’est pas ignorée.

Pour l’instant nous sommes sur la base du « Vous allez pouvoir travailler chez – vous !, nous allons vous envoyer le lien de connexion« . En disant cela rien n’est dit car la charge de l’organisation est déplacée sur l’apprenant. En introduisant une nouvelle façon de travailler, on prend le risque de bouleverser les habitudes, de mettre à mal les routines acquises. Les apprenants, les enseignants dans ce cadre qui se développe peuvent être déstabilisés dans leurs habitus, terreau fertile du rejet, nous le savons.

L’habitude, il serait facile de dire que c’est justement ce qui freine. J’aime me référer à Richard Sennett, notamment à son ouvrage « Le travail sans qualité – The corrosion of character, the personal consequence of work in the new capitalism« , 10/18, 1998 : « Le sociologue Anthony Giddens s’est efforcé de faire vivre l’intuition du philosophe en attirant l’attention sur la valeur première de l’habitude dans les pratiques sociales et la compréhension de soi. Nous ne testons d’autres solutions qu’en rapport avec des habitudes que nous avons déjà maîtrisées. Imaginer une vie d’élans momentanés, d’actions à court terme, une vie dépourvue de routines durables et sans habitudes, c’est en vérité imaginer une existence absurde« . Il ne faut pas mésestimer le poids des habitudes professionnelles, il faut les prendre comme un paramètre de la scénarisation.

L’investissement du domicile comme lieu de travail numérisé est un fait nouveau, nous n’avons pas ou peu d’habitudes, des routines embyonnaires. Je ne parle pas ici de l’introduction d’internet pour l’usage privé mais bien de sa dimension professionnelle. L’une et l’autre des pratiques sont bien différentes, c’est la raison pour laquelle on ne peut penser par calque. Pour l’instant il y a beaucoup à conquérir et beaucoup à apprendre.

Il faut donc penser, imaginer, réguler ces pratiques et ce pour plusieurs raisons :

  • Les concepts de temps et d’espaces sont bouleversés, il faut les définir à nouveau sans réduire les droits ;
  • Le salariat avec la naissance du capitalisme avait éloigné le travailleur de son domicile (Zaretski, 1986) pour qu’il soit plus productif. Le numérique favorise le retour vers le domicile. Comment gérer cette nouvelle donne ? ;
  • Les domiciles sont essentiellement pensés pour une activité privée, l’intermittence professionnelle bouleverse les agencements spatiaux ;
  • Le domicile chahute les habitudes du panoptisme sur site. Le travail à domicile tendrait à développer de nouvelles formes de contrôles plus fortes « Diverses études laissent penser que la surveillance au travail est souvent plus grande dans ce cas de figure que pour ceux qui travaillent au bureau » (Richard Sennett, ibid, p.80.) Comment agir pour introduire la confiance dans les relations à distance ?
  • Quelle place donner à la déconnexion ?

Le chantier est immense, il faut le prendre à bras le corps. J’entends par là être pro actif dans les politiques de déploiement. De mon point de vue il ne suffira pas d’intégrer des textes, des recommandations, des vidéos de bonnes pratiques sur un site. Il faudra accompagner, former, expliquer les enjeux. Il faudra que les corps intermédiaires aillent au contacts des acteurs et les former.

J’ai commencé modestement à formaliser ces questions sous forme de recommandations aux acteurs engagés dans la formation en ligne et voulant utiliser une classe virtuelle. Il s’agit d’un vademecum pour des étudiants en ligne. Avant que ne commence la formation il me semble indispensable d’expliquer ce que signifie travailler à partir de son domicile parce que c’est complexe.

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« →  La qualité de votre connexion internet

Capture d’écran 2015-09-19 à 08.50.14L’apprentissage en ligne est tributaire de la bonne connexion internet. Il est banal de le dire mais fondamental pour le bon déroulement des séances de formation. Vous pouvez commencer par tester en ligne la qualité en cliquant sur ce lien

Réglage du matériel de votre domicile

Il est conseillé d’avoir une connexion de type ADSL ou fibre pour bénéficier d’un débit fluide lors des réunions en classe virtuelle. Préalablement à la séance distante synchrone voici quelques conseils pour en optimiser l’efficacité :

Un lien de connexion vous sera envoyé sur votre messagerie. Nous vous conseillons de réaliser les réglages sons et vidéos en amont de la séance (jamais au dernier moment) en suivant les indications du lien.

→ Vérifiez que vous possédez un casque audio. Les écouteurs de votre smartphone sont suffisants. En l’absence d’écouteurs la mise en relation sonore de plusieurs personnes peut générer un effet larsen très désagréable. Nous vous conseillons donc vivement de vous le procurer si vous souhaitez profiter pleinement des cours.

→Vérifiez, si la géographie de votre installation personnelle le permet, que vous pouvez privilégier le branchement RJ45, plutôt que les ondes wifi.

→ Vous pouvez brancher votre ordinateur à la box grâce aux prises spécifiques situées sur la façade arrière. Nous sommes bien conscients que la possibilité de branchement dépend largement de l’espace qui sépare de votre box de votre ordinateur. Très souvent la box est éloignée des terminaux numériques. Des câbles RJ 45 existent et permettent les connexions filaires. Ils ont un inconvénient notable car ils vont devenir des obstacles pour les circulations de vos proches.

Les prises CPL

Vous pouvez vous équiper de prises CPL (Courant Porteur Léger) pour vous connecter en filaire (RJ 45) à partir de vos prises électriques. De la sorte, vous pouvez vous connecter de n’importe quel endroit de votre appartement sans vous préoccuper de la situation de la box. Pour les détails techniques et les prix demandez à votre revendeur habituel. Vous aurez ainsi réglé la question des câbles gênants en bénéficiant d’un débit satisfaisant.

Réglages du matériel de votre lieu de travail

→ Si vous vous connectez de votre entreprise vérifiez au préalable que la politique de sécurité informatique développée par votre DSI ne bloque pas l’accès aux solutions déployées (classes virtuelles notamment) et à la plateforme. N’oubliez pas que l’accès professionnel est lié à des contraintes de sécurité. C’est une démarche administrative assez longue et rien ne vous garantie qu’elle sera couronnée de succès. Il faut régler cette question dès le début de votre formation.« 

Collaboration et outils numériques

20 Août

En avançant dans mes observations sur le numérique, j’essaye de  prendre plus de distance sur la façon dont on instrumente les terminaux de réception. Ils participent à une nouvelle façon de travailler, notamment par collaboration. Je tiens à préciser que la collaboration n’est pas la conséquence de l’introduction d’une machine mais bien le fruit d’une envie, d’une scénarisation, d’une connaissance des enjeux, des potentiels de la collaboration.

Lorsque l’on est situé dans un espace physique équipé de matériel numérique je me demande si l’équation un ordinateur (quelque soit sa forme) un apprenant est systématiquement pertinente, notamment pour une première approche. Nous avons tendance à vouloir systématiquement équiper les apprenants d’un ordinateur. L’équation un apprenant / un ordinateur a du sens mais pas dans toutes les situations me semble t-il.

Les tables tactiles me semblent être un outil qui présente des fonctionnalités intéressantes. Elles favorisent une approche plus collaborative car elles engagent à la fois le corps et l’esprit :

Le corps, parce ce que l’on peut  interagir collectivement sur l’écran, se déplacer autour de la table ;

L’esprit car le geste s’accompagne d’un prise de parole. Celui qui active l’écran de la table s’oblige à expliquer ce qu’il fait, la logique de son raisonnement.

Il va de soi que les scénarios construits doivent intégrer cette dimension de la collaboration, que les enseignants expliquent à leurs élèves les modalités d’action. Nous retombons ici sur des problématiques que j’ai déjà évoquées i.e la place de la voix, l’agencement des salles de cours.

il sera intéressant de suivre l’activité du blog de tactileo. En attendant j’ai tenté de formliser en images mes propos.

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Espace personnel et bricolage

22 Juil

Billet en rapport

En complément de mon dernier billet (juillet 2015) je souhaite préciser mes intentions au regard de l’analyse sur l’espace privé de formation (nous dirons par simplification le domicile).

Je disais : « Il conviendra donc  de construire et de définir  l’espace de travail personnel. Là où l’on imagine une forme de liberté, peut se cacher une forme de servitude – La servitude technologique« 

Le domicile est un lieu d’une grande complexité et cela pour au moins deux raisons essentielles :

  • Les appartements, les maisons ne sont pas (ou peu) adaptés aux besoins des utilisateurs. On peut lister quelques éléments qui expliquent cette inadaptation :
    • L’ancienneté des maisons et / ou l’inadaptation technologique des lieux
    • Les dimensions des « domiciles ». Le pourcentage de personnes vivant en milieu urbain ne cesse de s’accroître. La pression urbaine augmente le coût d’investissement, le prix du M2 pour les propriétaires augmente, les loyers pour les locataires augmentent aussi. Les arbitrages financiers tendent à revoir à la baisse la surface habitable. Dans ces conditions il y a une pensée pour la salle de séjour, la cuisine, les chambres mais très peu pour le bureau et / ou le lieu de télétravail ;
    • La situation géographique du domicile et une forme de loterie en matière de connexion. Ce n’est pas la possibilité de se connecter qu’il faut prendre en compte mais bien le type de connexion qui est distribué sur le lieu. La France est loin d’être équipée harmonieusement en THD ;
    • La présence de masses de fer dans les appartements qui nuisent aux connexions, les appartements à étage qui réduisent l’efficacité du wifi, le faible équipement en prises électriques, l’absence de branchement pour les courants faibles, la mauvaise insonorisation, le passage aléatoire des débits 3G, 4G, l’absence de branchements collectifs dans les résidences et la nécessaire décision de la copropriété … ;
    • Les constructeurs de résidence ont-ils à ce jour intégré totalement le champ des possibles en matière de télétravail ? Je profite de ce développement pour solliciter à distance les constructeurs qui pourraient me lire pour engager le débat. Par défaut au regard de mes recherches, je constate que les livrables immobiliers pour les particuliers sont conçus plutôt pour l’ancienne économie.
  • Le facteur humain est l’autre dimension du problème. Isolé dans son espace privé on se prive de l’aide du technicien « corporate« . Il faut ici s’en remettre à des considérations intuitus personae. Chaque individu aura un bagage technologique spécifique qui conditionnera largement l’efficacité de son système technologique. C’est ici que je convoquerais à nouveau le concept de bricolage, eu égard aux éléments listés ci-dessus. Ne pouvant compter que sur eux mêmes, l’enseignant et l’apprenant doivent développer des stratégies pour entre dans la sphère du « faire ». Ce sont ces nécessaires bricolages qui feront la différence. Une différence qui peut être vertueuse en accédant à la connectivité ou alors vicieuse au sens ou elle peut avoir des conséquences néfastes. Je pense ici aux branchements sauvages rendus nécessaires par la multiplication des objets électriques (imprimantes, smartphone, box, téléphone fixe, tablettes, NAS, serveurs, ventilateurs, CPL, spot wifi …). J’imagine que l’utilisateur lambda ne se pose pas systématiquement la question de la sécurité électrique, elle est pourtant fondamentale (risque de surchauffe par branchements nombreux sur la multiprise, risque de rupture par la foudre, danger des câbles qui circulent anarchiquement, appartement surchauffé l’été qui peut entraîner des ruptures sur les appareils numériques …

On voit poindre ici un ensemble de questions pour l’avenir proche. Faut-il prévoir un vademecum des installations numériques pour le domicile ? Peut-on imaginer un audit technique de la part de l’employeur, quid de la sécurité au travail ? Comment imaginer les appartements à venir dans un environnement ou se développe le télétravail, que faire si un salarié est situé dans une zone mal desservie ?

Je pense qu’il va falloir se saisir au plus vite de ces questions qui sont sensibles de mon point de vue. Cet ensemble d’interrogations s’applique bien évidemment aux dispositifs de e.learning.

J’ouvre le débat…

De la ligne au cercle, industrialiser l’individualisation

11 Juil

Depuis quelques temps, la réflexion sur l’aménagement des lieux de formation est devenue un sujet de recherche et de mise en application. Nous voyons émerger des lieux de formation qui tentent de mettre en adéquation les principes de la collaboration, de la coopération avec les solutions mobilières et immobilières. On souhaite faire évoluer les modes d’apprentissage et les modes d’enseignement en pensant les espaces de façon différente.

Si l’on se prête au jeu de la synthèse, on cherche à rompre avec les principes rigides du transmissif pour aller vers des méthodes plus souples ou la collaboration ou l’individualisation sont inscrites comme principe. On tente de prendre en considération les besoins des apprenants qui ne sont plus les mêmes qu’il y a 20 ans. On cherche à éviter les décrochages, les abandons, à surmonter les exclusions dans la masse des formations du supérieur. La réduction de la fracture sociale et le besoin de rendre efficient l’investissement éducatif.

En observant ces travaux de modélisation, je ne peux m’empêcher de regarder du côté de l’histoire industrielle, notamment celle des années 70 dans l’industrie automobile.j’ai souvent dit dans ce blog que j’aimais raisonner en procédant par détour.

Après avoir su industrialiser le geste de l’artisan, le taylorisme s’est imposé comme mode de production massif. La chaine s’est inscrite dans le contexte de production pour réduire les coûts. Dans les années 70 les OS de l’industrie automobile se sont révoltés contre la rigidité du système, l’asservissement de la chaine. Une des solutions mises en place fut celle de l’ilot de production pour permettre aux salariés de rompre la monotonie.

Il y a une logique similaire entre l’agencement des espaces de l’industrie et l’agencement des espaces pédagogiques. On cherche à rompre la logique linéaire des ateliers pour créer des îlots (casser la rigueur de la ligne et la gestuelle répétitive qui asservit). En pédagogie on veut rompre avec la classe autobus pour créer des espaces et des formations plus mobiles, plus souples ou le cercle domine. La notion d’accompagnement et d’individualisation n’est jamais absente de ces réflexions. On veut que les élèves et étudiants participent, s’intéressent dans les processus d’acquisition. Dit autrement on cherche à rompre avec l’ennui qui s’installe dans les classes. Il s’agit de rendre rentable l’investissement de la nation dans l’éducatif (je souscrit à cet engagement démocratique) au moment ou nous engageons dans la société de l’immatériel.

Les dispositifs d’enseignement frontaux participent, me semble t-il, de la logique industielle. On demande aux apprenants d’ingurgiter les savoirs de manière automatique, des savoirs envoyés du haut et allant vers le bas. Les examens sont du même type, il s’agit de reproduire par automatisme des savoirs acquis. Compiler, agencer, massifier, assembler des unités entre elles, voila qui ressemble à de l’industrie. Celui qui suit le rythme de la chaine sera récompensé, celui qui est désynchronisé est exclu.

Nous entendons, à l’heure actuelle, un discours qui dénonce le risque d’industrialisation des processus d’éducation via le numérique. Je suis tenté de poser la question inverse, et si le numérique permettait de mettre à mal une forme d’enseignement fortement industrialisé parce que majoritairement frontal ? Le savoir est distribué à un rythme fixe, immuable cadré par l’emploi du temps, spatialisé dans un lieu normé (la classe, l’amphi, le centre de formation).

Une vidéo de l »INA donne un bon aperçu de cette question, il s’agit d’un reportage sur la question du travail à la chaine – La vidéo

Il y a des passages de cette vidéo qui coupés du contexte resonnent avec une terrible modernité pédagogique

  • « travail répétitif, parcellaire, imposé de l’extérieur » 1 minute 42
  • « les gestes sont répétés et n’ont aucun sens » 2 minutes 52
  • « La réflexion est exclue du processus de travail » 2 minutes 57
  • « l’atelier de taillage est à 80% autonome » – 232 minutes 30
  • « Intéresser les gens à leur travail » – 20 minutes

Il pourra m’être reproché d’opérer des associations hasardeuses mais … Je pense que le numérique a mis en évidence notre façon de construire les apprentissages. Elle est encore largement ancrée dans un schéma industriel construit au 19ème siècle. Nous commençons à voir des initiatives qui tentent d’imaginer d’autres espaces, pour d’autres constructions pédagogiques. Ces expériences d’agencement des lieux de formation brisent la géométrie éducative, on passe de la ligne de transmission des savoirs vers le cercle des learning center, learning lab, fablab, atelier de co-working, 3C ….

Nous devons former en masse et en qualité c’est notre avenir qui est en jeu. Il faut donc industrialiser l’individualisation (E.Davidenkoff)

Il y a, dans ces nouvelles tentatives, une ligne rouge qui nous unit dans le temps celle du passage de la ligne vers le cercle.

Espace

2 Juil

Lettre rédigée et jamais publiée …

Le thème : L’espace dans les dispositifs de formation

Pour ce numéro zéro nous avons choisi de traiter la question de l’espace de formation.

Depuis que le numérique est entré comme variable de conception des dispositifs de formation, l’espace est un concept qui est redéfini. Historiquement les cours, se déroulent sur le principe de l’unité de temps, et d’espace. Le numérique a modifié le paradigme spatio-temporel en augmentant le champ des possibles. L’espace de formation s’est diversifié, s’est flexibilisé au service de la convergence (Moiraud, 2014). Les dispositifs de formation sont désormais déployés dans les espaces physiques, qu’ils soient institutionnels ou personnels (domicile) ET dans les espaces numériques (Moiraud, 2014).

 

Les espaces physiques institutionnels sont quantifiables, les référentiels des constructions universitaires fixent des normes précises pour l’accueil des étudiants et des enseignants (Derouet-Besson, 2002). L’irruption des solutions numérisées a transformé le regard porté sur le corps immobilier. Il faut imaginer la salle de cours, l’amphithéâtre dans lesquels les Smartphones, les tablettes et les ordinateurs sont inclus. Quel sera le contour des Learning center ? Comment évoluent les SCD dans cet écosystème technologique ? (Inspection générale, 2012)

L’établissement de formation entendu comme structure immobilière institutionnelle n’est plus la référence unique dès lors que les enseignements et les apprentissages peuvent s’exercer à partir des lieux privés. Cette évolution n’est pas sans conséquence sur la professionnalité puisque l’intime s’immisce dans le champ du professionnel (Broadbent, 2012). Il est besoin de définir à nouveau la notion d’intimité (Serfaty-Garzon, 2003) au moment où le domicile se professionnalise par intermittence (Moiraud, 2013).

 

Les espaces formation sont devenus hétérogènes mais ne se situent pas pour autant dans un « univers parallèle » (Arfaoui & Lafay, 2013) mais sont complémentaires. La porosité entre le physique et le numérique est devenue prégnante. Comment doit-on définir l’espace de formation en ce début de 21ème siècle ? Nous vous proposons quelques pistes de lecture.

 

L’outil

 

Le CDNT organise une veille informationnelle pour suivre les évolutions du e-learning tant dans sa dimension technologique que scientifique. Le principe de base reste la lecture et l’analyse régulière de la littérature. Nous espérons ainsi pouvoir vous indiquer les grandes tendances, les débats, les controverses, l’état de la recherche dans le champ de la pédagogie instrumentée par le numérique.

 

Nous avons cependant rationalisé notre travail en intégrant les fonctionnalités d’un outil numérique qui se nomme Zotéro[1].

 

Pour ce numéro zéro nous avons choisi de traiter la question de l’espace de formation.

 

Depuis que le numérique est entré comme variable de conception des dispositifs de formation, l’espace est un concept qui est redéfini. Historiquement les cours, se déroulent sur le principe de l’unité de temps, et d’espace. Le numérique a modifié le paradigme spatio-temporel en augmentant le champ des possibles. L’espace de formation s’est diversifié, s’est flexibilisé au service de la convergence (Moiraud, 2014). Les dispositifs de formation sont désormais déployés dans les espaces physiques, qu’ils soient institutionnels ou personnels (domicile) ET dans les espaces numériques (Moiraud, 2014).

 

Les espaces physiques institutionnels sont quantifiables, les référentiels des constructions universitaires fixent des normes précises pour l’accueil des étudiants et des enseignants (Derouet-Besson, 2002). L’irruption des solutions numérisées a transformé le regard porté sur le corps immobilier. Il faut imaginer la salle de cours, l’amphithéâtre dans lesquels les Smartphones, les tablettes et les ordinateurs sont inclus. Quel sera le contour des Learning center ? Comment évoluent les SCD dans cet écosystème technologique ? (Inspection générale, 2012)

 

L’établissement de formation entendu comme structure immobilière institutionnelle n’est plus la référence unique dès lors que les enseignements et les apprentissages peuvent s’exercer à partir des lieux privés. Cette évolution n’est pas sans conséquence sur la professionnalité puisque l’intime s’immisce dans le champ du professionnel (Broadbent, 2012). Il est besoin de définir à nouveau la notion d’intimité (Serfaty-Garzon, 2003) au moment où le domicile se professionnalise par intermittence (Moiraud, 2013).

 

Les espaces formation sont devenus hétérogènes mais ne se situent pas pour autant dans un « univers parallèle » (Arfaoui & Lafay, 2013) mais sont complémentaires. La porosité entre le physique et le numérique est devenue prégnante. Comment doit-on définir l’espace de formation en ce début de 21ème siècle ? Nous vous proposons quelques pistes de lecture.

 

L’outil

Le CDNT organise une veille informationnelle pour suivre les évolutions du e-learning tant dans sa dimension technologique que scientifique. Le principe de base reste la lecture et l’analyse régulière de la littérature. Nous espérons ainsi pouvoir vous indiquer les grandes tendances, les débats, les controverses, l’état de la recherche dans le champ de la pédagogie instrumentée par le numérique.

 

Nous avons cependant rationalisé notre travail en intégrant les fonctionnalités d’un outil numérique qui se nomme Zotéro[1].

[1] Zotéro – http://www.zotero.org/

 

C’est « Un logiciel de gestion de références gratuit, libre et open source qui s’inscrit dans la philosophie du Web 2.01. Il permet de gérer des données bibliographiques et des documents de recherche (tels que des fichiers PDF, images, etc.). Ses principaux atouts techniques reposent sur l’intégration au navigateur web, la possibilité de synchronisation des données depuis plusieurs ordinateurs, la génération de citations (notes et bibliographies) dans un texte rédigé depuis les logiciels LibreOffice, Microsoft Word, NeoOffice, Zoho Books et OpenOffice.org Writer grâce à l’installation d’un plugin. Le développement du logiciel est à l’initiative du Center For history and New Media (CHNM) de l’université George Mason. » Source Wikipédia (consultation le 30 janvier 2014)

Cet outil aide évidemment à construire sa bibliographie par procédé d’instrumentation scénarisée. Il est loisible aux utilisateurs de partager, de Co-construire par acte de coopération et / ou de collaboration.

Le CDNT a ouvert un compte sur Zotéro que vous pouvez consulter en permanence à distance sur n’importe quel type de périphérique numérique (ordinateur, tablette, smartphone). Vous pourrez y trouver un ensemble de didacticiels décrivant les modalités de fonctionnement de Zotéro et des références bibliographiques ayant trait au e-learning.

Se connecter sur la bibliographie en ligne

http://www.zotero.org/groups/cdnt

La bibliographie.

Le BYOD (bring your own device)

Cet anglicisme à la mode est le révélateur d’une pratique très répandue. L’institution met à disposition des usagers des matériels et des logiciels. Dans les universités il est possible d’avoir accès à des salles informatiques, à des terminaux de connexions (au SCD notamment), à un ensemble de solutions numérisées comme la FDV.

L’accès aux cours, aux web de façon générale, s’effectue aussi à partir des solutions personnelles comme les ordinateurs personnels, les tablettes, les smartphones. Cette pratique qui se répand interroge les espaces de formation au sens ou la mobilité et le nomadisme s’installent comme une variable forte des processus de formation.

  • Gicquel Camille, Utiliser son ordinateur personnel, quel risque pour les entreprises ? , Regard sur le numérique (RSLN), (2013)

·      Service TICE, Université de Sherbrooke, Canada, Le fin mot : BYOD, site web, (consultation, le 31 janvier 2014) https://www.usherbrooke.ca/ssf/veille/bulletins/2011-2012/mars-2012/le-fin-motnbsp-byod/

La surveillance, la porosité de l’espace intime et de l’espace professionnel.

 L’espace de formation traditionnel est fondé sur le principe de la surveillance, « on pointe », on inscrit, on surveille. Les enseignants en TD font l’appel, le jour des examens il faut vérifier l’identité des candidats pour éviter des fraudes potentielles.

 Le numérique, là encore, transforme les questions de surveillance panoptique. Le privé s’immisce dans le professionnel et le professionnel devient une dimension de l’intime.

  • Arfaoui et Lafay, Non internet n’est pas un univers parallèle, Revue Esprit, (2013)

  • Baron, Xavier, Repenser l’espace et le temps du travail intellectuel, management review, (2011)

  • Broadbent Stefana, L’intimité au travail : la vie privée et les communications personnelles dans l’entreprise, FYP éditions, (2012)

  • Casili Antonio, Les liaisons numériques, seuil, (2012)

  • Doueihi Milad, Pour un humanisme numérique, Seuil, (2013)

  • Foucault Michel, Surveiller et punir, Gallimard, (1975)

·      Rey Claudie & Sitnikoff Françoise, Télétravail à domicile et nouveaux rapports au travail, Revue interventions économiques, (2006)

  • Sennett Richard, le travail sans qualités, les conséquences humaines de la flexibilité, Titre original the corrosion of character, the personal consequences of work in the new capitalism, Albin Michel, (1998)

  • Serfaty-Garzon Perla, Chez soi, les territoires de l’intimité, Armand Colin (2003)

 Les espaces de formation.

L’espace de formation étant devenu hétérogène les universités doivent se poser la question de l’agencement des espaces. Des lieux emblématiques sont en train de se transformer. Le SCD évolue, la salle de cours est redéfinie dans ses contours, le domicile se professionnalise par intermittence.

·      Pascal Cotentin, Visite de l’université de Kingston avec Graham BULPITT, Scéren, (2012)

·      Claude Devès, Odile Grandet & AL, Learning center et territoire : comment la bibliothèque s’insère dans son environnement institutionnel, économique et social ?, Université Blaise Pascal, (2013) http://videocampus.univ-bpclermont.fr/?v=Bpxts7EZEAMR

·      Graham Bulpitt, Le rôle pédagogique des personnels non-enseignants, les journées du e.learning, (2013)

http://www.journees-elearning.com/index.php/videos-2013/226-graham-bulpitt

  • Inspection générale des bibliothèques, Les Learning centres: un modèle international de bibliothèque intégrée à l’enseignement et à la recherche, Rapport- n° 2009-022, (2009)

  • Mazalto Maurice, Architecture scolaire et réussite éducative, Editions Fabert, (2007)

NB : Nous retiendrons comme définition du learning center : «Un soutien réel à l’acquisition de connaissances garanti par une liaison beaucoup plus étroite avec les enseignants dès la conception du projet ; des espaces conviviaux, ouverts et flexibles ; une accessibilité maximale en termes d’horaires et de ressources ; des facilités d’usage à distance ; un personnel polyvalent et un regroupement des services ; des ressources documentaires et des équipements nombreux et renouvelés », Les Learning centres un modèle international de bibliothèque intégrée à l’enseignement et à la recherche

 Des ressources multimodales.

Le CDNT tente d’isoler les signaux faibles qui émergent en éducation. De l’invention de l’imprimerie (1454) à l’invention du protocole TCP/IP (1983) le savoir a été fixé essentiellement grâce au texte et l’image. Lorsque le web 2.0 apparaît, les dispositifs de formation intègrent massivement les ressources multimodales (texte, image, son, vidéo).

Nous vous proposons une sélection de ressources médias pour compléter ce dossier.

  • De la Porte Xavier, vie professionnelle / vie privée, Place de la toile (2012)

http://www.franceculture.fr/emission-place-de-la-toile-vie-professionnelle-vie-privee-2012-12-22

  • De la Porte Xavier, Culture du livre, culture des écrans, entretien avec Serge Tisseron, Place de la toile (2013)

http://www.franceculture.fr/emission-place-de-la-toile-culture-du-livre-culture-des-ecrans-2013-03-23

  • De la Porte Xavier, entretien avec Stefana Broadbent, l’intimité au travail, Place de la toile, (2011)

http://www.franceculture.fr/emission-place-de-la-toile-stefana-broadbent-rediffusion-2011-11-12

  • De la Porte Xavier, entretien avec Milad Doueihi, Pour un humanisme numérique, Place de la toile, (2011)

http://www.franceculture.fr/emission-place-de-la-toile-pour-un-humanisme-numerique-2011-10-29

  • De la Porte Xavier, entretien avec Antonio Casili, Les liaisons numériques, Place de la toile, (2010)

http://www.franceculture.fr/emission-place-de-la-toile-les-liaisons-numeriques-2010-09-26.html

Les lieux intelligents :

·      Enseigner dans une salle de classe intelligente, ESSCA, (2012)

http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=qLCz5jyJ_K0

Gwnenaelle Le Mauff, Le LearningLab : l’apprentissage collaboratif de demain, EM Lyon, (2013)

http://www.youtube.com/watch?v=JygbI8d45jA

[1] Zotéro – http://www.zotero.org/

 

Numérique et modification des modes travail. L’ère du knowledge worker

4 Juin

Ma revue de presse de ce jour me fait lire une dépêche de l’AEF (ci-dessous) à propos de la conférence de la CPU qui s’est tenue à Strasbourg. Valoriser les services des personnels est la question centrale qui est traitée. Au-delà de l’introduction du numérique, il s’agit d’une réflexion sur le changement de notre société et de ses modes de travail. La CPU met à plat des hypothèses de fond qui  explorent les modifications des paradigmes de temps et d’espace à l’Université (et ailleurs). Entre temps et statuts …

La lecture de cette dépêche a eu comme un effet électrique chez moi, car ce sont les thématiques que je développe depuis des années (un peu seul dans mon coin il faut bien le reconnaître). Je suis heureux de constater qu’elles sont traitées dans des instances comme la CPU. Vous verrez peut-être ce billet comme une vaniteuse opération d’autosatisfaction (je l’assume). Voyez le plutôt comme le constat d’ une forme de validation de mes hypothèses. Il y a dix ans beaucoup considéraient mes tentatives d’analyses comme un exercice intellectuel peu probant et marginal, je suis heureux de constater que les lignes de fractures bougent.

Je me livre à un travail de relecture de mes billets et publications car il me semble que les discussions de la CPU donnent de la vigueur à mes analyses.

Je pense que l’article qui résume le mieux le lien entre mes réflexions en liaison avec les réflexions strasbourgeoises est celui ci. Je crains que nous soyons encore loin du but car il s’agit d’une question de métanoïa (un renversement de la pensée) plus que de métamorphose (changement du corps). Appeler de ses vœux le changement et avoir le changement donne la mesure du chemin à parcourir. Je reste cependant persuadé que c’est la direction à emprunter.

Listons les items abordés :

  • « Le suivi des étudiants à distance » ; – Article
  • « Revisiter la façon de décompter leur service » ; – ArticleArticleArticleArticleArticle
  •  » L’égalité de traitement entre individus » ; – Article
  • « Est-ce que nos statuts sont adaptés pour libérer ces énergies ? « ; – Article
  •  » Le passage d’un système pyramidal et multicouches, à un système où les hiérarchies seraient écrasées ? » – Article
  • « Demandes de plus en plus fortes de télétravail » – Article
  • « La constitution d’équipes pédagogiques, composées de toutes les compétences dont nous avons besoin » –Article
  • « Les enseignants veulent pouvoir changer leurs pratiques pédagogiques. Comment prendre cela en compte, comment les valoriser ? » – Article
  • « Comment doit-on calculer le service, dès lors que le présentiel n’est plus seul point de repère ? » – ArticleArticleArticle Article

EAF / Dépêche n° 501356 : Face aux enjeux du numérique, comment accompagner et valoriser les personnels ? (colloque CPU)

Les nouvelles méthodes de travail introduites par le numérique, avec les pédagogies en mode projet, « inversées », et le suivi des étudiants à distance, remettent en question les modes d’organisation dans les universités, selon les participants à un atelier organisé lors du colloque de la CPU, à Strasbourg le 28 mai 2015. Plusieurs intervenants estiment que la reconnaissance de l’investissement des enseignants- chercheurs nécessite de revisiter la façon de décompter leur service. L’atelier, consacré aux « impacts du numérique sur les organisations et les métiers », était l’occasion d’échanger sur l’adaptation des personnels des universités aux enjeux du numérique, la rénovation des pratiques pédagogiques, mais aussi sur la « posture » actuelle des enseignants-chercheurs et des cadres, l’égalité de traitement entre individus, le sens du collectif…

À l’ère du numérique, « il y a un questionnement sur nos formes actuelles d’organisation, nos pratiques pédagogiques, nos pratiques de recherche. À un moment donné, est-ce que nos statuts sont adaptés pour libérer ces énergies ?« , avance Gérard Blanchard, président de l’université de La Rochelle et vice-président de la CPU, en introduction d’un atelier organisé dans le cadre du colloque annuel de la CPU, à Strasbourg le 28 mai 2015. Les échanges ont porté sur les évolutions des méthodes de travail et sur les moyens d’accompagner le changement (matériel, formation des personnels, management, etc.). En voici quelques échos :

Quelle « transformation » des organisations ? « L’outil numérique modifie-t-il la structure organisationnelle [de l’université], avec le passage d’un système pyramidal et multicouches, à un système où les hiérarchies seraient écrasées ? Je n’ai pas vécu cela », témoigne Jacques Haiech, professeur de biotechnologies à l’université de Strasbourg (Snesup-FSU). « D’ailleurs, ce n’est pas un outil qui impose l’implémentation d’une organisation, ni même d’une vision politique, au sein de l’université », indique-t-il.

« Pour autant, souligne Gérard Blanchard, l’utilisation de certains outils numériques nous amène à repenser nos approches pédagogiques, éventuellement dans certains cas nos approches organisationnelles, et bien entendu le modèle économique. C’est une vision systémique qu’il faut avoir ». Il cite en exemple la notion de « science ouverte » qui « remet en cause les méthodes de travail. Ces nouvelles approches plaident pour le développement de démarches menées un peu plus en mode projet, et ce, dans des organisations structurées verticalement ».

L’accompagnement des personnels : une « hétérogénéité » face au numérique. Plusieurs participants pointent une « hétérogénéité » dans l’appropriation des outils numériques chez les personnels, ce qui implique « un accompagnement » et des formations. « Pour les enseignants- chercheurs, l’Espé pourrait être une partie de la réponse ; dans tous les cas, cela relève de la politique interne de formation et de ses priorités. Aujourd’hui, les niveaux de crédits sont insuffisants, c’est clair, il y aura des efforts à faire », estime Gérard Blanchard.

Par ailleurs, les équipes de direction observent « des demandes de marge d’autonomie plus forte, de la part de l’ensemble des personnels », pointe Madeleine Zalkind, DRH de l’université Joseph- Fourier Grenoble-I. De nouveaux enjeux se font jour : « comment répondre aux demandes de plus en plus fortes de télétravail, de travail en autonomie, ou de travail en mode projet ? », résume-t-elle. De fait, « là où le mode projet s’est développé fortement, comme dans les directions du numérique ou les DSI, force est de constater un manque d’équipe stable, de référents, autrement dit de gens qui arbitrent », rapporte-t-elle. Face aux « conflits et oppositions » qui peuvent émerger, « il y a des besoins de régulation, de médiation relationnelle ».

La nécessité de retrouver le sens du « collectif » dans les modes d’organisation a été mise en évidence. Pour Gérard Blanchard, l’évolution des formations passera par « la constitution d’équipes pédagogiques, composées de toutes les compétences dont nous avons besoin :

enseignants-chercheurs, ingénieurs, etc. ».

Brigitte Riera, vice-présidente de l’université de Cergy-Pontoise en charge des RH, note que si l’utilisation du numérique peut créer de « l’isolement », elle peut conduire aussi à « un retour du dialogue » avec les représentants du personnel, ce qui a été le cas dans son établissement sur la question du télétravail ou encore sur le fonctionnement de la bibliothèque universitaire.

Défis sur le statut des enseignants-chercheurs. Les évolutions du métier d’enseignant- chercheur face à ces mutations technologiques ont été débattues, notamment sous l’angle de la reconnaissance des services. « Les enseignants veulent pouvoir changer leurs pratiques pédagogiques. Comment prendre cela en compte, comment les valoriser ? », abonde Feriel Goulamhoussen, directeur du campus numérique de l’Upem. Il propose par exemple « un congé thématique d’innovation pédagogique » ou encore des décharges.

Pour assurer cette « reconnaissance » de l’investissement des personnels, plusieurs directions d’université souhaitent surtout voir évoluer la façon de décompter le service d’enseignement. « Comment doit-on calculer le service, dès lors que le présentiel n’est plus seul point de repère ? », interroge Madeleine Zalkind. Elle prône « une prise de recul par rapport au décompte très comptable actuel » (les 192 heures TD), en « se posant la question d’un décompte qualitatif, ou laissant davantage de place à des situations particulières, comme pour les hospitalo-universitaires ».

« Pour éviter de rentrer à nouveau dans une logique comptable, il s’agit de repenser complètement l’activité », suggère Gérard Blanchard. Pour Youssoufi Touré, président de l’université d’Orléans, « le terme service est aujourd’hui caduque ». « Le seul élément qui puisse être uniforme, par rapport aux individus, ce sont les 1 607 heures », poursuit-il. Une alternative, envisagée par Alain Célérier, vice-président du conseil d’administration de l’université de Limoges, serait de s’inspirer de l’exemple canadien. « Le service d’un enseignant consiste à faire acquérir un certain nombre de crédits à un groupe d’étudiants, par semestre. Cela peut fonctionner, quelle que soit la méthode utilisée : cours magistral/TD, ou classe inversée, etc. »

Avancer ou s’arrêter

27 Avr

sipa_ap21623684_000004  L’intégration du numérique dans le corps social ne cesse de me questionner parce qu’il est comme le Pharmakon Grec (tout dépend de la dose injectée, cela soigne ou cela tue). J’ai observé pendant deux jours (25 et 26 avril 2015) une opération de Remix, le GAREMIX qui consistait à imaginer, à faire des propositions pour agencer autrement le lieu gare, lieu  de passage. La gare Saint Paul de Lyon était l’objet de cette réflexion collective citoyenne.

Peut-on s’arrêter dans une gare ? Peut-on y exercer une activité sociale d’interaction ? C’est ce que j’ai compris de ce happening urbain interactif.

Venu pour observer sans objectifs précis, j’en suis ressorti avec des questions supplémentaires. J’ai l’habitude de voyager. Dans mon ancien métier j’allais régulièrement à Lille, depuis quelques années je me rends à Poitiers. Dans les deux cas j’arpente les gares de l’axe Lyon, Marne la Vallée, Charles de Gaulle, Lille Europe.

Ce sont des lieux nouveaux que je déteste, alors même que l’association béton, verre m’a toujours séduit, ainsi que le voyage. Pourquoi suis je dans le registre de la détestation ? Parce que ces gares sont aujourd’hui conçues pour des Hommes en mouvement qui  ne font que transiter. Froideur est l’adjectif qui convient le mieux pour décrire ces endroits. Surtout ne pas s’arrêter, se prémunir du froid (savamment entretenu par l’espace vide entre les murs et le toit) l’hiver et des courants d’air en toute saison. Plus de lieux de convivialité comme le train bleu de la gare de Lyon. La cafétéria sinistre, glaciale semble prévue pour bannir à jamais le mot gastronomie. De la première, à la dernière gorgée, la bière est fade, elle se résume au  simple geste du boire-poser le verre répété, compteur du temps qui reste avant l’annonce. du départ.

On ne s’arrête pas, on ne s’arrête plus, la bête humaine au 21ème siècle n’est plus le pilote mais le passager. Il est en mouvement, dans un immobilier fonctionnel, plus ou peu de sociabilité dans ces mausolées tristes ou le roi n’est pas, n’est plus. Architecture de Pouvoir sans le pouvoir.

Alors le passager entre dans d’autres espaces ou le social existe. C’est  celui des réseaux, tout le monde à la tête penchée sur son terminal, avance dans la gare, avance sur le quai, fuit le froid, monte dans le train…

La gare n’est plus qu’un lieu symbolique, un passage entre un avant et un après. Le présent de béton n’est pas.

J’espère que #garemix sera un début de réflexion sur la place de la gare, sa fonction (à nouveau) sociale, en réel comme en virtuel. Que vive le co-design